Les difficultés de recrutement dans les polices municipales s'accentuent
La Ville de Paris prévoit le recrutement de 400 policiers municipaux sur concours tout en cherchant à attirer aussi des agents en poste dans d'autres communes. Il manquerait actuellement 4.000 agents en France par rapport aux postes à pourvoir, dont 1.500 en Ile-de-France. Cette pénurie de main-d’œuvre pousse à la surenchère salariale.
La Ville de Paris se met à recruter à tour de bras pour sa toute nouvelle police municipale, qui sera de loin la plus importante de France. Elle va ouvrir 400 postes sur concours (interne et externe), les postulants ayant du 18 octobre au 26 novembre pour s'inscrire. En parallèle, la municipalité administrée par Anne Hidalgo tentera d'attirer des policiers municipaux déjà en exercice ailleurs. « Il y a 129 postes inscrits dans le budget 2021 et des postes vacants pourront être aussi pourvus », indique Nicolas Nordman, l'adjoint à la maire en charge de la sécurité .
Les promesses des maires élus en 2020
D'ici à 2026, la capitale entend disposer d'une nouvelle direction de la police municipale et de la prévention forte de 5.000 agents, dont 3.600 policiers municipaux. Ses 1.100 inspecteurs de sécurité de la ville de Paris (ISVP) et ses 1.100 agents de surveillance de Paris (ASP) sont appelés à endosser cet uniforme après une formation dans son école des métiers de la sécurité. La première promotion de153 policiers municipaux arrivera sur le terrain le 19 octobre.
Cette vague de recrutements à Paris intervient alors que la filière est sous tension et que de nombreux maires élus en 2020 ont promis de renforcer leurs effectifs. « Il manque 4.000 policiers municipaux en France par rapport aux postes à pourvoir, dont 1.500 en Ile-de-France », estime Cédric Michel, président du Syndicat de défense des policiers municipaux (SDPM), qui déplore le nombre insuffisant de concours organisés par les centres de gestion départementaux.
En quête d'agents déjà formés
Les communes se livrent à une véritable foire d'empoigne pour attirer des policiers municipaux et les conserver. D'autant, souligne Cédric Michel, qu'elles « préfèrent de plus en plus recruter des agents déjà formés et assermentés plutôt que de prendre des novices issus des concours qui devront partir en formation et ne seront pas sur le terrain avant six mois ou plus ».
« Nous cherchons à recruter sept à huit policiers dans les douze mois à venir, mais ce n'est pas évident étant donné la concurrence », témoigne Jean-Pierre Laroche de Roussane, adjoint à la sécurité à la mairie de Versailles. Au cours des douze derniers mois, cette commune en a embauché trois, mais elle n'a eu qu'une petite quinzaine de candidatures. Ce qui est problématique. « Comme notre police est armée, nous sommes contraints à une vigilance plus particulière sur les recrutements », explique l'élu.
Cette course aux policiers municipaux pousse à une surenchère. « Le salaire médian d'un gardien-brigadier est de 1.800 à 2.000 euros net par mois, avec primes et avantages. Mais en Ile-de-France ou dans le Sud-Est, cela peut monter à 3.000 euros, voire plus », avance le président du SDPM. Selon lui, la création de la police municipale de Paris ne devrait pas avoir trop de répercussions sur les autres villes franciliennes : « Elles sont pour la plupart déjà très hautes en termes de rémunérations et la police municipale de Paris ne sera pas attractive car elle n'a pas d'armes létales », affirme-t-il.
Mercato permanent
La Ville de Paris estime avoir d'autres arguments à faire valoir. « Nous avons créé un modèle de police municipale différent, d'ultra-proximité, exemplaire, avec des agents qui seront régulièrement formés. Cela peut contribuer à la rendre attrayante », espère Nicolas Nordman, qui met aussi en avant « des missions bien plus diverses à Paris qu'ailleurs ».
Pour tirer leur épingle du jeu dans ce « mercato » permanent, les communes essayent de ne rien laisser au hasard. « Nous avons travaillé sur tous les leviers possibles pour garder notre attractivité, comme la rémunération, l'armement, l'équipement, les cycles de travail ou encore la variété des missions proposées. Chez nous, il est possible de changer de brigade ou de mission au bout de quelques années », énumère ainsi Emilion Esnault, adjoint à la sécurité à la mairie de Toulouse, qui veut recruter 100 policiers supplémentaires pendant ce mandat.
« Nous aidons les policiers municipaux à s'installer dans notre ville », souligne de son côté Nathalie Koenders, première adjointe à la mairie de Dijon, qui veut procéder à 30 embauches dans les deux ans.
Par Laurent Thévenin
Publié le 8 oct. 2021